Une histoire de la trigonométrie
La trigonométrie (du grec trígonos, « triangulaire », et métron, « mesure ») est une branche des mathématiques qui traite des relations entre distances et angles dans les triangles et des fonctions trigonométriques telles que sinus, cosinus et tangente.
Les origines de la trigonométrie remontent aux civilisations Egyptiennes, Mésopotamiennes et Indiennes, il y a plus de 4 000 ans.
Il semblerait que les Babyloniens aient les premiers développé des concepts mathématiques avancés afin de traiter des problèmes liés à l'astronomie. On s'accorde généralement sur le fait que la contemplation du ciel nocturne à l'époque ait succité admiration, émerveillement et engendré l'envie de faire des recherches sur le sujet. C'est d'ailleurs de ces fantastiques scientifiques babyloniens qui utilisaient un système de numération en base 60, que nous est resté le découpage de heures et minutes en 60 et le découpage du cercle en 360 degrés.
Table des cordes, avant celle des sinus
L'une des tâche de l'astronomie fût l'établissement de tables permettant le passage de la mesure des angles à celle de arcs et des cordes. (Corde, d’un cercle), d’intestin en hittite, puis saucisse en grecs).
Les premières tables des cordes, celles du mathématicien grec d'Hipparque de Nicée (-190 ; -120), ont été perdues. On s'accorde à voir en les travaux d'Hipparque, l'ancêtre de la trigonométrie.
Poursuivant les recherches des astronomes Babyloniens, il introduit la division du cercle en 360° et, grâce à un immense travail d'observations des astres, il établit les premières "tables de cordes".
Avec ces tables, il découvrit que l'axe de la terre n'était pas fixe ! Il se déplaçait le long d'un cercle pour revenir à la même place tous les 26 000 ans environs : la précision des équinoxes.
L'unité d'angle d'Hipparque de Nicée (-190 ; -120) était le degré qu'il partageait en 60 minutes, et les minutes en 60 secondes, comme faisaient jadis les babyloniens !
Les tables du mathématicien grec PTOLÉMÉE Claude (90 - 168) établissaient le passage entre les longueurs des cordes et celles des valeurs d'arcs.
C'est à dire ici, entre l'angle θ et la longueur AB de la corde [AB]. Plus précisemment, pour un cercle de rayon 1 = AO = OB, on a AB = 2 sin θ/2 et donc une relation entre le sinus de l'angle et la corde.
C'est bien l'ancètre du sinus.
Montrons que la corde AB = 2 sin θ/2 Puisque le cercle est de rayon 1,
Dans le triangle BHA rectangle en H on a d'après le théorème de Pythagore : AB² = BH² + HA² = sin² θ + (1 - cos θ)²
Or on a cos 2θ = 1 - 2sin² θ
Alors
AB² = 4sin²(θ/2) et puisque tout est positif ici
AB = 2 sin θ/2 |
Dans un traité devenu célèbre, "l'almageste", PTOLÉMÉE Claude expose toute la trigonométrie de l'antiquité. Il explique comment calculer des longueurs de cordes et publie une table très complète.
Ces tables de cordes sont les premiers exemples de fonctions dans l'histoire des mathématiques. C'est à cette époque que les Grecs ont pris l'habitude de diviser le cercle en 360 degrés.
Les fameuses premières tables de cordes que l'on peut observer dans l'Almageste de PTOLÉMÉE sont visibles sur le site gallica de la BNF.
Tables des sinus
En 499, un mathématicien INDIEN nommé ARYABHATA, a eût la bonne idée de considérer la demi-corde de l'angle double plutôt que la corde de l'angle. Les indiens ont ainsi remplacé les tables des cordes par celles de sinus. Le nom indien donné à la demi-corde de l'angle double deviendra notre sinus après avoir été traduit arabe puis en latin. Âryabhata utilise zya pour sinus, kotizya pour cosinus et otkram zya pour l'inverse du sinus. Il introduit aussi le sinus verse.
Un autre mathématicien indien, Brahmagupta, utilise en 628 l'interpolation numérique pour calculer la valeur des sinus jusqu'au second ordre.
Etymologiquement, sinus est la demi-corde, le terme vient de "jiva" en sanscrit "corde d’arc".
Sinus donna "jiba" en arabe "poche, repli de vêtement" puis en latin "sinus = sein".
La précision de tout calcul astronomique repose sur l’exactitude de la table des sinus (dont la construction est liée au problème de la trisection de l’angle).
Al-Khwarizmi (IX-X) poursuit les travaux de Ptolémée et affine les tables de sinus, puis ABU AL-WAFA (10e siècle) ou NASIR AL-DIN AL-TUSI en établient d'autres toujours plus précises.
Tangente
Juste après, Habash al-Hasib dit "le calculateur", originaire d’Égypte, inventa la tangente qui est l'outil idéal pour mesurer des hauteurs.
Et l'Occident ?
A partir du 12ème siècle, beaucoup d'ouvrages mathématiques sont traduits en latin ce qui permet aux connaissances mathématiques de pénétrer l'Europe.
La trigonométrie se développe vers le milieu du XIVe siècle avec la traduction en latin des œuvres de Ptolémée. Les pionniers en ce domaine sont le mathématicien autrichien Georg von Purbach (1423-1461) et surtout son étudiant Regiomontanus (1436-14756). Suivent au début du XVIe siècle les traités d'Oronce Finé, Pedro Nunes et Joachim Rheticus. Le mathématicien silésien Bartholomäus Pitiscus publie un travail remarquable sur la trigonométrie en 1595, dont le titre (Trigonometria) a donné son nom à la discipline. C'est le mathématicien flamand Adrien Romain (1561-1615) qui introduit la notation moderne \({\displaystyle \sin \ \alpha } \).
DESCARTES René (1596 - 1650) montre qu'on peut utiliser les sinus pour calculer la déviation d'un rayon lumineux qui passe d'un milieu à un autre (réfraction de la lumière). Désormais on utilise la trigonométrie dans toutes les branches de la physique.
Les symboles
Le symbole sin :
En 1583, Thomas Fincke (ou Finck) (1561-1656) utilise sin dans le livre 14 de sa Geometria rotundi, il serait selon Cajori le premier à l'utiliser.
Le symbole cos :
Ball and Asimov disent que cos fut utilisé par William Oughtred (1574-1660), en 1657 pour Ball et 1631 pour Asimov.
Cependant, Cajori dans sa thèse prétend que William Oughtred utilise sco pour cos.
En 1674, Sir Jonas Moore (1617-1679) utilise Cos. dans Mathematical Compendium ainsi que Samuel Jeake (1623-1690) dans Arithmetick (1696).
Ce serait cependant Leonhard Euler en 1729 dans Commentarii Academiae Scient. Petropollitanae, ad annum 1729 qui participe à le diffusion de ce symbole.
Le symbole tan :
En 1583, Thomas Fincke (1561-1656) utilise tan dans le livre 14 de sa Geometria rotundi. Fincke utilisait aussi tang.
En 1632, William Oughtred (1574-1660) utilise tan dans The Circles of Proportion (1632)
Albert GIRARD (1595-1632) utilise les notations " sin, cos et tan " en 1626, dans Tables de sinus, tangentes et sécantes.
Le mot sinus :
Mais c'est l'Allemand REGIOMONTANUS ( 15ème siècle), qui est le créateur du mot sinus dans ses travaux sur la trigonométrie (De Triangulis omnimodus en 1464, publié en 1533)
Bibliographie
- [Guedj1] : Denis GUEDJ, Le théorème du perroquet, Seuil, p250.
- [DaDaPe] : A.DAHAN-DALMEDICO/J.PEIFFER, Une histoire des mathématiques, Seuil, Paris, 1986. p 69
- [HaSu] : B. Hauchecorne et D. Surateau, Des mathématiciens de A à Z, Ellipse, Paris, 1996.
- [Cajo] : Florian CAJORI, History of mathematicals notations, Thèse de réf. 01-1 CAT.74.