Une histoire du calcul différentiel, de la dérivation et de la notion de tangente
Naissance du concept de tangente
Le célèbre mathématicien grec Archimède de Syracuse (-287 ; -212) le premier semble s'intéresser à la notion de tangente. Il énonce des propriétés concernant notamment les tangentes à la spirale qui porte son nom.
Des siècles plus tard, le mathématicien italien Torricelli (1608-1646) et le français Roberval (1602-1675) prolongent la méthode d'Archimède et apportent les premières pierres à un édifice majeur des mathématiques, le calcul infinitésimal.
La tangente comme position limite
Le mathématicien français Pierre de Fermat (vers 1610-1665), surnommé "prince des amateurs", décrit ensuite la tangente comme position limite d'une sécante à une courbe. C'est la définition qu'on utilise aujourd'hui comme sur l'animation ci-dessus.
René Descartes (1596-1650), souvent très dur envers Fermat, critiquera le manque de rigueur de ce dernier ce qui pousse "l'amateur" à clarifier et à étendre sa méthode.
L'école anglaise ... Barrow avant Newton
Les méthodes analytiques de Descartes et de Fermat ont beaucoup de succès en Angleterre et sont donc reprises par John Wallis (1616-1707) et James Gregory (1638-1675). Ceci pousse le mathématicien Issac Barrow (1630-1677), le prédécesseur d'Isaac Newton (1643-1727) à la chaire de mathématique de l'université de Cambridge à développer une méthode des tangentes par le calcul, très proche de celle actuellement utilisée. Il expose cette méthode dans ses cours.
Newton et Leibniz
Puis le mathématicien anglais Newton (1643-1727) et allemand Leibniz (1646-1716), indépendamment l'un de l'autre, inventent des procédés algorithmiques ce qui tend à faire de l'analyse dite infinitésimale, une branche autonome des mathématiques. Newton publie en 1736 sa méthode la plus célèbre, la méthode des fluxionse et des suites infinies.
Vers plus de rigueur
C'est cependant Blaise Pascal qui, dans la première moitié du 17e siècle, a le premier mené des études sur la notion de tangente à une courbe - lui-même les appelait « touchantes ». Le marquis de l'Hospital contribuera à diffuser le calcul différentiel de Leibniz à la fin du 17e siècle grâce à son livre sur l'analyse des infiniment petits. Wallis, mathématicien anglais (surtout connu pour la suite d'intégrales qui porte son nom) contribua également à l'essor de l'analyse différentielle.
Néanmoins cette théorie tout juste éclose n'est pas encore, à l'époque, pourvue de toute la rigueur mathématique qu'elle aurait exigée, et notamment la notion d'infiniment petit introduite par Newton, qui tient plus de l'intuitif, et qui pourrait engendrer des erreurs dès lors que l'on ne s'entend pas bien sur ce qui est ou non négligeable.
Le taux d'accroissement
C'est au XVIIIe siècle que Jean le Rond d'Alembert (1717-1783) introduit la définition plus rigoureuse du nombre dérivé en tant que limite du taux d'accroissement - sous une forme semblable à celle qui est utilisée et enseignée de nos jours. Cependant, à l'époque de d'Alembert, c'est la notion de limite qui pose problème. C'est seulement avec les travaux de Weierstrass au milieu du 19e siècle que le concept de dérivée sera entièrement formalisé.
$$f'(a)=\displaystyle{\lim_{h \rightarrow0}}~ t(h)=\displaystyle{\lim_{h \rightarrow0}} ~\dfrac{f(a+h)-f(a)}{h}$$
Les notations
C'est au mathématicien français Joseph-Louis Lagrange (1736-1813) que l'on doit la notation \(\displaystyle f'(x)\) , aujourd'hui usuelle, pour désigner le nombre dérivé de \(\displaystyle f\) en \(\displaystyle x\) . C'est aussi à lui qu'on doit le nom de « dérivée » pour désigner ce concept mathématique.
Continuité et dérivabilité
- Continue mais pas dérivable en un point.
L'exemple le plus simple de fonction continue mais pas dérivable en un point est la fonction valeur absolue. Cette dernière est continue mais pas dérivable en zéro. - Continue mais jamais dérivable.
Le premier exemple publié d'une fonction qui est continue partout mais qui n'est dérivable à aucun endroit est la fonction de Weierstrass, aussi appelée fonction de Weierstrass-Hardy. On la doit aux mathématiciens allemands Karl Weierstrass et Leopold Kronecker. Il semble cependant que Bernhard Riemann ait montré en 1861 qu'elle est non dérivable sur un ensemble dense des réels et que les hypothèses ont été améliorées par G. H. Hardy.
Il s'agit en fait d'un groupe de fonctions qui peut être défini comme suit :
$$\displaystyle f(x)=\sum _{n=0}^{\infty }a^{n}\cos(b^{n}\pi x) ~~\text{où}~~~~ \begin{cases} 0<a<1 \\ ab>1+ \frac {3}{2} \pi \end{cases}$$
Les propriétés de cette fonction sont similaires à celles des fractales
Sources
- [DaDaPe] : A.DAHAN-DALMEDICO/J.PEIFFER, Une histoire des mathématiques, Seuil, Paris, 1986.
- [Dieudo] : Jean DIEUDONNÉ, Abrégé d'histoire des mathématiques, Hermann Editeurs, Paris, nouvelle édition 1986.