Identité de Newton – Sommes de puissances et racines de polynômes
L’identité de Newton (ou formules de Newton-Girard) relie les sommes des puissances des racines d’un polynôme à ses coefficients. C’est une technique classique utilisée pour retrouver ou anticiper des puissances élevées sans connaître explicitement les racines.
Isaac Newton (4 janvier 1643 – 31 mars 1727 )
1. Définition générale
Soit un polynôme :
P(x)=xn+a1xn−1+a2xn−2+⋯+an−1x+an
On note ses racines r1,r2,…,rn, et les puissances :
Sk=rk1+rk2+⋯+rkn
Alors pour tout entier k≥1, la formule de Newton donne :
Sk+a1Sk−1+a2Sk−2+⋯+ak−1S1+kak=0
2. Exemple
Soient a,b,c trois nombres réels tels que :
- a+b+c=1
- a2+b2+c2=2
- a3+b3+c3=3
On pose Sn=an+bn+cn. Pour relier les Sn, on suppose que a,b,c sont racines d’un polynôme de degré 3 :
P(x)=x3−px2+qx−r
Par les formules de Viète, on sait alors que :
- p=a+b+c
- q=ab+bc+ca
- r=abc
Les sommes Sn vérifient pour tout n≥3 la relation de récurrence :
Sn=pSn−1−qSn−2+rSn−3
soit ici
Sn=(a+b+c)×Sn−1−(ab+bc+ca)×Sn−2+abc×Sn−3
Détermination des coefficients
À partir de a+b+c=1, on a directement p=1.
Ensuite, on utilise :
a2+b2+c2=(a+b+c)2−2(ab+bc+ca)
D’où : 2=12−2q⇒q=−12
Puis avec : a3+b3+c3=(a+b+c)3−3(a+b+c)(ab+bc+ca)+3abc
On obtient : 3=13−3⋅1⋅(−12)+3r⇒r=16
Récurrence finale
La relation entre les Sn devient donc :
Sn=Sn−1+12Sn−2+16Sn−3
Calculs explicites
On connaît :
- S1=1
- S2=2
- S3=3
On en déduit :
S4=3+12×2+16×1=3+1+16=256
S5=256+12×3+16×2=256+32+13=366=6
Conclusion : a5+b5+c5=6
3. Tableau de récurrence des identités de Newton
Les identités de Newton, également appelées formules de Newton-Girard, établissent une relation entre les sommes des puissances des racines d'un polynôme et ses coefficients. Ces relations permettent de calculer les sommes Sk=rk1+rk2+⋯+rkn sans connaître explicitement les racines ri.
Considérons un polynôme unitaire de degré n :
P(x)=xn+a1xn−1+a2xn−2+⋯+an−1x+an
Soient r1,r2,…,rn les racines de P(x). On définit :
Sk=rk1+rk2+⋯+rkn
Les identités de Newton établissent que, pour tout entier k≥1 :
Sk+a1Sk−1+a2Sk−2+⋯+ak−1S1+kak=0
avec la convention que aj=0 pour j>n.
Relations pour les premières valeurs de k
Ordre k | Formule de Newton |
---|---|
1 | S1+a1=0 |
2 | S2+a1S1+2a2=0 |
3 | S3+a1S2+a2S1+3a3=0 |
4 | S4+a1S3+a2S2+a3S1+4a4=0 |
Exemple d'application
Considérons le polynôme :
P(x)=x3−6x2+11x−6
Les coefficients sont :
- a1=−6
- a2=11
- a3=−6
Calculons S1 :
S1+a1=0⇒S1=−a1=6
Puis S2 :
S2+a1S1+2a2=0⇒S2=−a1S1−2a2=−(−6)(6)−2(11)=36−22=14
Et S3 :
S3+a1S2+a2S1+3a3=0 S3=−a1S2−a2S1−3a3=−(−6)(14)−11(6)−3(−6)=84−66+18=36
Ces relations permettent de calculer les Sk de manière récursive, en utilisant les coefficients du polynôme et les valeurs précédemment calculées de Sj pour j<k.
4. Anecdotes sur Newton
- Isaac Newton a développé ces formules en lien avec ses travaux sur les suites symétriques.
- Il a aussi écrit des textes sur l’alchimie, la Bible, et l'optique.
- Il a dirigé la Royal Society et inventé un télescope à miroir révolutionnaire.
- En 1668, Newton invente le premier télescope à miroir, dit télescope de Newton, pour corriger les défauts des lunettes astronomiques. Présenté à la Royal Society en 1672, cet instrument révolutionne l'observation astronomique en utilisant la réflexion plutôt que la réfraction.
Une réplique du télescope réflecteur que Newton présenta à la Royal Society en 1672
(le premier qu’il fabriqua en 1668 fut prêté à un fabricant d’instruments, mais on ne sait pas ce qu’il est devenu par la suite)
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