∏ : Formules magiques et approximations
Le nombre pi est au coeur des mathématiques et malgré plus de 4 000 ans de travail, les mathématiciens arrivent encore à lui trouver quelques mystères. Il s'immisce dans des domaines aussi variés que la géométrie, l'analyse, les statistiques, la physique, l'algèbre, les probabilités.
Les babyloniens vers - 2 000, les égyptiens puis surtout les grecs furent les premiers à proposer des approximations du nombre Pi.
Le célèbre Archimède vers 250 av. J.C. parvient à obtenir deux décimales exactes du rapport magique, puis Ptolémé 3 décimales vers 150, on arrive à 6 décimales avec le mathématicien chinois Zu Chongzhi (429 - 500), 11 avec l'indien MADHAVA de Sangamagrama (1350 - 1425), 14 avec le perse Al-Kachi ou Al-Kashi (vers 1380-1429) et la barre symbolique des cent décimales est atteinte par le mathématicien anglais John MACHIN (1686-1751) à l'aide d'une formule qui porte son nom.
Les méthodes utilisées sont alors assez proche de celle d'Archimède qui utilise des polygones reguliers inscrits dans un cercle de diamètre 1.
Avec le XVIIIème siècle et le calcul différentiel de Newton et Leibniz, le calcul de π se dégage de la géométrie et utilise des formules analytiques complexes. Par exemple : le quart du nombre π est égal à la somme infinie :
$${\pi \over 4}=1-{1\over 3}+{1\over 5}-{1\over 7}+{1\over 9}-{1\over 11}+{1\over 13}-\cdots$$
Un grand progrès de cette époque, en Europe, est de considérer de telles sommes d'une infinité de termes et de leur donner un sens. Cela permit au mathématicien suisse (de la pébublique de Mulhouse à l'époque) Johann Heinrich Lambert (1728-1777) de démontrer en 1761 que π n'est pas un nombre rationnel, c'est-à-dire que ce n'est pas le quotient de deux nombres entiers et donc que la suite de ses décimales ne présente pas de périodicité, qu'elle est infinie.
La chasse aux décimales de π est alors vraiment lancée !
Formules magiques
On peut trouver une valeur approchée de π de façon empirique comme on le fait souvent faire à des élèves de sixième.
- On choisit un objet circulaire puis on mesure son diamètre et sa circonférence. Il suffit alors de diviser la circonférence par le diamètre.
Une autre approche géométrique, attribuée à Archimède, consiste à calculer le périmètre Pn d'un polygone régulier à n côtés et à mesurer le diamètre d de son cercle circonscrit, ou celui de son cercle inscrit. Plus le nombre de côtés du polygone est grand, meilleure est la précision obtenue pour la valeur de π.
On peut également obtenir des valeurs approchées de π en mettant en œuvre des méthodes plus modernes. La plupart des formules utilisées pour calculer π se basent sur la trigonométrie et le calcul intégral. Cependant, certaines sont particulièrement simples, voyons en quelques-unes qui, on va le constater, ne convergent pas forcément très vite.
Ce n'est pas ainsi que les japonais ont battu en 2011 le record, avec plus de 10 000 milliards de décimales de Pi !
Pour mémoire
$$\pi \approx 3,14~15~92~65~35~89~79~32~38~46~26~43~38~32~795$$
Formule 1 : La série de Madhava-Leibniz
$$\pi =4 \times \left( 1-{1\over 3}+{1\over 5}-{1\over 7}+{1\over 9}-{1\over 11}+{1\over 13}-\cdots \right)$$
C'est la série de Leibniz, du nom du mathématicien anglais Gottfried Wilhelm Leibniz (1646-1716) — également connue sous le nom de série de Madhava-Leibniz — dont la convergence est vraiment lente.
Elle a été découverte en Occident au 17e mais apparaît déjà chez Madhava, mathématicien indien de la province du Kerala, vers 1400. La thèse la plus courante est que les travaux mathématiques indiens de cette période ne seront connus en Occident qu'à la fin du 19e siècle, pendant la colonisation de l'Inde par la Grande-Bretagne.
Malheureusement, cette formule n'est pas très efficace : il faut calculer 200 termes pour obtenir 2 décimales. Pour 100 décimales, il faudrait plus de termes qu'il n'y a de particules dans l'Univers !
En considérant la somme \(S_n\) définie pour tout entier \(n\) par :
$$S_n=4{\displaystyle \sum_{k=0}^n \dfrac{(-1)^k}{2k+1}}$$
On a :
$$\pi \approx 3,14~15~92~65~35~89~79~32~38~46~26~43~38~32~795$$
- \(S_{10}~~~\approx 3,23~23~15\) : 0 décimale
- \(S_{100}~~\approx 3,15~14~93\) : 1 décimale
- \(S_{200}~~\approx 3,14~65~37\) : 2 décimales
- \(S_{1~000}\approx 3,14~25~91\) : 2 décimales
Formule 2 : Avec la formule de John Machin
La barre symbolique des cent décimales de Pi est atteinte par le mathématicien anglais John MACHIN (1686-1751) à l'aide d'une formule qui porte son nom.
$$\dfrac{\pi}{4}=4 \arctan {1 \over 5}-\arctan {1 \over 239}$$
C'est avec cette formule qu'il élabore une série convergent vers \(\pi\)très rapidemment.
En considérant la somme \(S_n\) définie pour tout entier \(n\) par :
$$S_n=4\displaystyle \sum_{k=0}^{n} \dfrac{(-1)^k}{2k+1} \left( 4\dfrac{1}{5^{2k+1}}-\dfrac{1}{{239}^{2k+1}}\right)$$
On a :
$$\pi \approx 3,14~15~92~65~35~89~79~32~38~46~26~43~38~32~795$$
- \(S_{1}~\approx 3,14~05~97\) : 2 décimales
- \(S_{2}~\approx 3,14~16~21\) : 3 décimales
- \(S_{3}~\approx 3,14~15~91\) : 5 décimales
- \(S_{10}\approx 3,14~15~92~65~35~89~79~32~94\) : 16 décimales
On le voit, la convergence est très rapide, on obtient 72 décimales correctes pour \(n=50\) ce qui explique le succès de cette formule.
On peut en fait démontrer que la convergence est d'environ \(1,4n\).
Autres formules : Les séries de Riemann
Pour tout nombre entier \(a\) - on généralise même aux complexes - on appelle série de Riemann, du nom de mathématicien allemand Georg Friedrich Bernhard Riemann (1826-1866), la série définie par la somme des inverses des puissance a-ème des entiers.
Pour tous entiers non nul \(a\) :
$${\displaystyle \sum_{k=1}^{+\infty} \dfrac{1}{k^a}}$$
On a réussi à prouver la convergence des séries pour \(a>1\) et même à déterminer les limites pour \(a\) pair.
Pour les impairs en revanche, on ne sait rien, sauf pour \(a=3\). Dans ce cas, le mathématicien français Roger Apéry (1916-1994) a démontré en 1978 que la somme est irrationnelle.
Regardez, c'est magique :
$$\displaystyle \sum_{k=1}^{+\infty} \dfrac{1}{k^2}=1+{1\over 2^2}+{1\over 3^2}+{1\over 4^2}+{1\over 5^2}+\cdots=\dfrac{\pi^2}{6}$$
$$\displaystyle \sum_{k=1}^{+\infty} \dfrac{1}{k^4}=1+{1\over 2^4}+{1\over 3^4}+{1\over 4^4}+{1\over 5^4}+\cdots=\dfrac{\pi^4}{90}$$
$$\displaystyle \sum_{k=1}^{+\infty} \dfrac{1}{k^6}=1+{1\over 2^6}+{1\over 3^6}+{1\over 4^6}+{1\over 5^6}+\cdots=\dfrac{\pi^6}{945}$$
$$\displaystyle \sum_{k=1}^{+\infty} \dfrac{1}{k^8~}=1+{1\over 2^8}+{1\over 3^8}+{1\over 4^8}+{1\over 5^8}+\cdots=\dfrac{\pi^8}{9~450}$$
$$\displaystyle \sum_{k=1}^{+\infty} \dfrac{1}{k^{10}}=1+{1\over 2^{10}}+{1\over 3^{10}}+{1\over 4^{10}}+{1\over 5^{10}}+\cdots=\dfrac{\pi^{10}}{93~555}$$
Par exemple, en considérant la somme \(S_n^2\) définie pour tout entier \(n\) par :
$$S_n^2=\sqrt{6\displaystyle \sum_{k=1}^n \dfrac{1}{k^2}}$$
On a :
$$\pi \approx 3,14~15~92~65~35~89~79~32~38~46~26~43~38~32~795$$
- \(S_{10}^2~~~\approx 3,04~93~61\) : 0 décimale
- \(S_{100}^2~~\approx 3,13~20~76\) : 1 décimale
- \(S_{200}^2~~\approx 3,13~68~26\) : 1 décimale
- \(S_{1~000}^2\approx 3,14~06~38\) : 2 décimales